L’escarre est une lésion cutanée de forme conique à base profonde, d’origine ischémique liée à une compression excessive et prolongée des tissus mous entre une saillie osseuse et un plan dur (lit ou fauteuil). Son apparition est souvent brutale et son évolution très rapide : occlusion vasculaire puis ischémie loco-régionale et enfin nécrose tissulaire irréversible.
On distingue trois types d’escarres :
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- L’escarre « accidentelle » liée à un trouble temporaire de la mobilité, de la vigilance et/ou de la conscience.
- L’escarre « plurifactorielle » du sujet au lit et/ou au fauteuil, polypathologique où prédominent les facteurs intrinsèques. Les localisations peuvent être multiples, le pronostic vital est en jeu. Le traitement est surtout médical.
- L’escarre « neurologique » conséquence d’une pathologie chronique, motrice et/ou sensitive : la topographie est surtout sacrée ou trochantérienne.
La classification la plus fréquemment utilisée est celle de la SHEA (Society for Healthcare Epidemiology of America) en 5 stades selon la profondeur des lésions sous sa forme modifiée par le NPUAP (National Pressure Ulcer Advisory Panel).
Stade 0 |
Peau intacte mais risque d’escarre. |
Stade I |
Erythème : altération de la peau intacte liée à la pression se manifestant par une modification de la température de la peau (chaleur ou froideur) et/ou de la consistance du tissu (ferme ou molle) et/ou de sa sensibilité (douleur, démangeaisons) en comparaison avec la zone corporelle adjacente ou controlatérale. |
Stade II |
Désépidermisation : perte d’une partie de l’épaisseur de la peau touchant l'épiderme, le derme ou les deux. L’escarre est superficielle et se présente cliniquement comme une abrasion, une phlyctène ou une ulcération peu profonde. |
Stade III |
Nécrose : perte de toute l’épaisseur de la peau avec altération ou nécrose du tissu sous-cutané (sèche ou humide) qui peut s’étendre jusqu'au fascia, mais pas au-delà. L’escarre se présente cliniquement comme une plaie profonde avec ou sans envahissement des tissus environnants. |
Stade IV |
Ulcère : perte de toute l’épaisseur de la peau avec destruction importante des tissus, ou atteinte des muscles, des os ou des structures de soutien (tendons, articulations). Un envahissement et des fistules peuvent être associés à ce stade. Rechercher les signes de gravité tels que : décollement, contact osseux, fistule et infection. |
- Traitement général :
Identifier les circonstances d’apparition et mettre en place des soins de bonne qualité (suppression de l’appui sur la zone concernée…) sans mettre en danger d’autres régions du corps.
- Traitement local :
Le choix du pansement s’appuie sur l’aspect de la plaie (sèche, exsudative, hémorragique, malodorante), sa couleur ou encore sa localisation et l’état de ses berges.
- Traitement chirurgical :
Son indication repose sur une analyse de l’escarre, l’état du patient, de sa pathologie et de son environnement.
- Traitement de la douleur :
La douleur de l’escarre peut être spontanée ou non, brutale et inattendue, limitée aux soins, aux changements de position ou aux mobilisations ou encore présente en continu. Elle n’est pas corrélée à la taille de
l’escarre. L’utilisation d’antalgiques selon la stratégie en 3 paliers est recommandée, un traitement en continu peut parfois être nécessaire.
- Facteurs mécaniques : pression, friction, cisaillement, macération de la peau.
- Facteurs cliniques : immobilité, état nutritionnel et malnutrition, incontinence urinaire et fécale, état de la peau, baisse du débit circulatoire, neuropathie, état psychologique, âge, antécédent d’escarres, déshydratation, maladies aiguës, pathologies chroniques et leur phase terminale.
Seules l’immobilisation et la dénutrition sont réellement des facteurs prédictifs du risque d’escarre.
Dans quelques situations cliniques, certains facteurs sont plus spécifiques :
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En neurologie, orthopédie et traumatologie
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- la pression
- la perte de mobilité
- déficit neurologique
- spasticité
- incontinence
- le risque per-opératoire
- la manque de coopération du patient
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- l'âge
- le tabagisme
- la corticothérapie
- le diabète
- les troubles de la microcirculation
- la coagulation
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- maladies cardio-vasculaires
- hypotension artérielle
- hyperthermie
la fragilité particulière de la peau et du tissu sous-cutané et l’insuffisance d’apports protido-caloriques augmentent le risque d’escarre
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- la fréquence des collapsus
- la gravité de l’état initial
- l’incontinence fécale
Même si le jugement clinique est un bon prédictif de la survenue d’escarre, l‘utilisation d’échelles de risque reproductibles et validées permet, en association avec le jugement clinique, d’évaluer le risque d’escarre et de mettre en place des mesures de prévention adaptée et ce, dès le premier contact avec le patient.
En outre, elles permettent de sensibiliser et mobiliser l'ensemble des soignants à l’intérêt d’une prise en charge globale. L’échelle de Braden claire et simple d’utilisation est, en France, l’échelle recommandée.
Echelle de Braden : 6 critères d’évaluation :
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- Perception sensorielle : capacité à répondre de manière adaptée à l’inconfort provoqué par la pression
- Humidité : degré d’humidité auquel est exposée la peau.
- Activité : degré d’activité physique
- Mobilité : capacité à changer et à contrôler la position du corps.
- Nutrition : habitudes alimentaires
- Friction et cisaillement
- Identifier les facteurs de risque :
L’évaluation clinique associée à l’utilisation d’une échelle de risque permet d’élaborer une stratégie de prévention adaptée à chaque patient. Une nouvelle évaluation est recommandée à chaque changement d’état du patient.
- Observer de manière régulière l’état cutané et les zones à risque :
L’observation cutanée associée à une palpation de la peau doit être quotidienne, à chaque changement de position et lors des soins d’hygiène afin de détecter précocement une altération cutanée.
- Maintenir l’hygiène de la peau :
Éviter la macération par une toilette quotidienne et renouvelée, si nécessaire. Massages, frictions, applications de glaçons et d’air chaud sont interdits.
- Diminuer la pression :
La mobilisation et la mise au fauteuil, la verticalisation, la reprise de la marche ou encore l’utilisation de supports (matelas,surmatelas, coussins de siège) adaptés au patient et à son environnement permettra d’éviter les
appuis prolongés.
Assurer un équilibre nutritionnel en évaluant quantitativement les prises alimentaires.
- Favoriser la participation du patient et de son entourage :
Prévention des escarres par une information et des actions éducatives ciblées en fonction du caractère temporaire ou permanent du risque d’escarre (autosurveillance, autosoulèvement).