Généralités et chiffres
Les brûlures représentent un traumatisme cutané potentiellement grave, de survenue fréquente, en particulier chez les plus jeunes. En effet, on recense chaque année en France, plus de 150.000 brûlures, entraînant plus de 9.000 hospitalisations et environ 400 décès directement liés, dont 219 à l'hôpital.
La surveillance des brûlures reste complexe car il est difficile d'estimer le nombre total de patients brûlés. Globalement, le nombre de brûlures reste stable tout au long de l'année, montrant l'importance d'une prévention et d'une vigilance continues.
Certaines causes de brûlures émergent plus que d’autres. Les principales causes de brûlure restent les accidents domestiques (60 à 70%) :
Les brûlures thermiques représentent ainsi, à elles seules, près de 93% des causes de brûlures, dont,
- brûlures par « feu-flammes-fumée » (26%) liées à un incendie, à l’utilisation d’un barbecue, en cuisine (four, plaques chauffantes) ou par fer à repasser. Ce type de brûlures représente 43% des brûlures sévères.
- brûlures par liquides chauds (38%) (casserole et douche ou bains trop chauds).
Les enfants de moins de 5 ans, qui concentrent près de 30% des brûlures, constituent la classe d'âge la plus touchée, mais avec un risque de décès heureusement réduit. Les brûlures sont globalement beaucoup plus graves chez les personnes âgées et la moitié des 219 personnes décédées à l'hôpital pour brûlures en 2011 avait plus de 65 ans.
La gravité des brûlures peut se résumer en 2 points essentiels :
- Un taux de mortalité non négligeable et la survenue de complications locales et générales, qui peuvent être majorées par des soins inappropriés dès les premiers gestes.
- Les complications fonctionnelles, si la brûlure touche des zones dites sensibles, comme l’un des 4 membres, la main en particulier, le cou, le visage et les plis de flexion.
Facteurs de gravité et complications
Toute brèche cutanée entraîne un risque d’infection, de déshydratation et/ou d’hypothermie d’autant plus élevé que la surface concernée est importante et profonde. L’évaluation de la gravité d’une brûlure cutanée est donc la première condition d’une prise en charge adaptée, aux urgences, en service spécialisé ou en ambulatoire.
La gravité d’une brûlure cutanée, vitale ou fonctionnelle, dépend de 4 facteurs :
- le degré de profondeur.
- l’étendue de la brûlure.
- la localisation de la brûlure.
- les facteurs associés (locaux ou généraux).
Le degré de profondeur de la brûlure, un critère majeur : si 4 degrés caractérisent la profondeur de la brûlure, pour chaque brûlure, quelle que soit son étendue, on cherchera toujours l’atteinte la plus profonde car c’est elle qui guidera ensuite la prise en charge et permettra d’estimer le temps de cicatrisation.
- 1er degré : il s’agit fréquemment du « coup de soleil » où seul l’épiderme superficiel est atteint ; la couche basale séparant l’épiderme du derme n’est pas atteinte. Ce type de brûlure se manifeste essentiellement par un érythème cutané qui cicatrise habituellement en 3-4 jours.
- 2ème degré superficiel: tout l’épiderme et la couche basale sont atteints. La brûlure se présente sous forme d’érythème cutané centré par des phlyctènes, sans saignement sous-jacent. Les récepteurs de la douleur ne sont pas détruits. La brûlure cicatrise habituellement en 7-10 jours.
- Le 2ème degré profond : tout l’épiderme et les premières couches du derme sont atteints, détruisant notamment certains récepteurs nociceptifs. Les phlyctènes sont souvent plus larges, ouvertes, avec un saignement sous-jacent. Ce type de brûlure cicatrise habituellement en 2 à 3 semaines.
- 3ème degré : il s’agit d’une destruction totale du derme, qui se présente par des zones blanchâtres, insensibles à la douleur. Une brûlure du 3ème degré nécessite obligatoirement une prise en charge spécialisée avec le recours, dans certains cas à la greffe de peau.
- 4ème degré: la carbonisation et la destruction totale du membre ou de la zone concernée implique un recours obligatoire à la chirurgie.
L’étendue de la brûlure, second critère principal : l'étendue de la brûlure est mesurée par la règle de 9 de Wallace, avec des règles différentes pour l’adulte, l’enfant et le nourrisson.
Ainsi, une brûlure dont la surface est estimée à plus de 10% de la surface corporelle chez l'adulte et l'enfant de plus de 5 ans ou à plus de 5% chez l'enfant de moins de 5 ans, sera considérée comme grave et nécessitera obligatoirement une prise en charge spécialisée, du fait des risques infectieux, hydroélectrolytique et cicatriciel. En dehors de tout autre signe de gravité, la brûlure peut être prise en charge en ambulatoire, avec le recours aux pansements locaux, en plus des antalgiques.
La localisation de la brûlure : certaines localisations entraînent des risques spécifiques ou des inconvénients esthétiques qui justifient une prise en charge immédiate médicale. Il s’agit, en particulier :
- des brûlures de la main qui présentent 3 risques fonctionnels spécifiques.
- un risque de cicatrice rétractile, gênant après cicatrisation le bon fonctionnement de la main.
- un risque de brûlure circonférentielle, avec possible ischémie du doigt.
- un risque de complications liées à la présence de bijoux non retirés immédiatement.
- des brûlures des organes génitaux externes qui vont nécessiter la pose au plus tôt d’une sonde urinaire à demeure, à cause du risque de sténose urétrale cicatricielle. La sensibilité de la zone justifie également des soins locaux rapides par le médecin.
- des brûlures en zone “esthétique” au visage, décolleté..., et des brûlures des plis de flexion, posant essentiellement un problème fonctionnel, sauf du 1er degré, doivent être médicalisées au plus tôt par les urgences puis les services spécialisés afin d'obtenir une cicatrice finale optimale.
Enfin, on n’oubliera pas de prendre en compte dans l’évaluation les éléments cliniques associés.
Sur un plan local, la nature de l’agent brûlant (agent chimique par exemple), la présence de vêtements collés ou de bijoux sur la zone brûlée qui peuvent compliquer l’évolution d’une brûlure cutanée. De même, sur un plan plus général, l’inhalation concomitante de fumée (incendie), l’âge extrême, une immunodépression (chimiothérapie, séropositivité VIH) ou encore un diabète sont autant de facteurs inducteurs de complications.
Comme pour tout traumatisme, les brûlures cutanées, fussent-elles superficielles, peuvent s’accompagner de complications, locales ou générales, infectieuses ou cicatricielles avec des conséquences fonctionnelles ou esthétiques. Des complications qui peuvent altérer globalement l’état moteur et psychologique de la personne.
Les complications locales des brûlures superficielles sont essentiellement infectieuses et cicatricielles. Elles peuvent survenir, quoique rarement, même en cas de brûlure du 1er degré.
- Les complications infectieuses : ces complications surviennent principalement sur des brûlures du 2ème degré ou plus profondes. La peau, barrière physiologique contre les agressions extérieures, porte en permanence de très nombreux germes. Toute brèche dans la couche basale de l’épiderme est une porte d’entrée à l’infection, qui se traduira localement et essentiellement sous forme d’érysipèle et plus rarement sous forme de panaris au niveau des doigts ou des orteils.
- Les complications cicatricielles : ces complications après une brûlure peuvent être fonctionnelles ou esthétiques.
- Les complications cicatricielles fonctionnelles sont liées à une rétraction des tissus qui suit rapidement la brûlure. Aussi, la prise en charge des brûlures sur certaines localisations doit être bien conduite par des équipes spécialisées.
- Une brûlure des organes génitaux, du fait du risque de sténose urétrale, nécessitera la pose au plus tôt d’une sonde urinaire à demeure et la suite de sa prise en charge sera confiée à des «brûlologues ».
- De même, une brûlure au niveau de la main, des doigts en particulier, nécessitera une prise en charge précoce par des équipes spécialisées du fait du risque de blocage ou de réduction de la mobilité des doigts.
- Les complications cicatricielles esthétiques peuvent également intervenir. Comme après une plaie cutanée, la cicatrice résiduelle peut être rétractile ou devenir chéloïde, entraînant une déformation inesthétique de la cicatrice. Peu étendue, localisée en zone peu exposée, une telle cicatrice peut éventuellement être tolérée du fait de l’absence de retentissement fonctionnel. En revanche, sur le visage, le décolleté, voire sur les membres, elle peut nécessiter une prise en charge chirurgicale secondaire, parfois lourde. D’où l’importance d’une bonne prise en charge initiale et d’un suivi en service spécialisé, pour une intervention correctrice au bon moment.
Les complications générales sont essentiellement l’apanage de brûlures étendues, supérieures à
10% de la superficie chez l'adulte et le grand enfant et 5% chez les moins de 5 ans, touchant des patients aux âges extrêmes, sur des terrains débilités. Une grande prudence et un avis spécialisé au moindre doute sont recommandés, même si l’aspect initial peut sembler plutôt bénin.
Prise en charge envisagée
Après les premiers gestes, une prise en charge adaptée doit être rapidement mise en oeuvre pour éviter toute complication quasiment toujours liée à une mauvaise prise en charge initiale. Or les recommandations de prise en charge évoluent avec l’apparition de nouveaux dispositifs de pansement, testés dans des études cliniques plus récentes.
Ne pas abuser du "tulle gras - flammazine"
Il n'y a pas dans la littérature médicale de grandes études sur la prise en charge locale des brûlures cutanées portant sur la comparaison de pansements. Deux méta-analyses récentes, publiées par la
Cochrane Library, apportent cependant un éclairage nouveau :
- (1) Wasiak J et al. (2013) « Pansements pour les brûlures superficielles et du 2nd degré » : Cette méta-analyse de 30 essais contrôlés-randomisés, d’ailleurs considérés de mauvaise qualité, suggère que les brûlures superficielles et du second degré cicatrisent plus rapidement avec des pansements de nylon recouvert de silicium, contenant de l'argent et des pansements biosynthétiques qu'avec une crème de sulfadiazine d'argent. Les pansements à base d’hydrogel favorisent une guérison plus rapide.
- (2) Barajas-Nava LA et al (2013) « Prophylaxie antibiotique pour prévenir l’infection des plaies des brûlures : Cette méta-analyse de 36 études (dont 26 sur topiques locaux) montre non seulement que le bénéfice des antibiotiques n’est pas clairement établi mais que la sulfadiazine d'argent appliquée directement sur la brûlure augmente réellement le taux d'infections de 8 % à 80 %.
Les pansements hydrogels
Avec un peu de recul, entre des recommandations de la SFETB qui datent au mieux de 2005 et les méta-analyses très récentes remettant en cause de vieilles habitudes de soins - en partie portées par les recommandations de 2005 - il est temps aujourd’hui, de considérer de nouvelles options thérapeutiques.
En effet, les pansements hydrogels en plaque, constitués à plus de 50% d'eau, de catégorie B selon leurs propriétés, réservés aux brûlures propres superficielles (voir ci-dessus) apportent une nouvelle option thérapeutique pour d'autres types de brûlures :
- Brûlures du 1er degré douloureuses : effet antalgique ET hydratant
- Brûlures du 2ème degré superficiel en zones algiques (paume des mains, plantes des pieds)
En l'absence d'études complémentaires, la place de ces pansements dans la prise en charge des brûlures profondes ne peut être envisagée.
Auteur :
Dr. Jean Sende, Médecin urgentiste - Service des Urgences - Hôpital privé Armand Brillard (94130 Nogent-sur-Marne)
Sources :
Newsletter Plaies et Cicatrisation Santé log, juillet 2014
Fiches de recommandation de la SFETB et Critères d'hospitalisation des brûlés (SFETB)
INVS (Données épidémiologiques PMSI pour les hospitalisations, CépiDc pour la mortalité) et Hospitalisations pour brûlures à partir des données du Programme de médicalisation des systèmes d'information, France métropolitaine 2011 et évolution depuis 2008.
Vidéos
Vidéos des modes d’action des pansements
Cas cliniques
Brûlures chimiques et thermiques de différents degrés
Pansements adaptés
Les pansements irrigo-absorbants nettoient et assainissent la plaie
Les hydrogels en plaque hydratent et cicatrisent la plaie.
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